Extratosoma Tiaratum
Me voila de retour pour vous parler d'une de mes passions, qui, bien que passée un peu à l'as ces derniers temps, reviens de plus belle! Je veux bien sur parler de cet interêt pour nos amis les petites bêtes. Et comme il n'est jamais trop tard pour bien faire, je me suis lancé dans une expérience qui m'a toujours tentée mais que je n'avais jusqu'alors jamais mise en pratique; je veux parler de l'élevage des phasmes!
Les phasmes sont les insectes parmi le plus commun en élevage domestique, et ce n'est pas un hasard... car ils ont vraiment tout pour être passionnants! Non seulement ils sont les insectes les plus longs du monde (le plus grand, Phobaeticus chani, possède un corps qui peut attendre 35,6cm de long, soit la taille d'un avant bras humain) mais ce n'est pas tout! Leurs capacités de mimétisme sont extraordinaires; en effet, il est parfois bien difficile de les distinguer parmi les feuillages ou les brindilles. C'est une évolution qui leur est une aide précieuse car bien souvent, ils ne possèdent pas ou très peu de moyens de défense convenables contre leurs prédateurs, tel que les oiseaux ou les chauves souris. Passer inaperçus leur évite bien souvent d'être dévorés tout crus! Autre particularité étonnante; certains phasmes, tout comme chez leurs cousines les phyllies (qui elles prennent l'apparence d'une feuille pour se camoufler) se reproduisent... tout seuls! Et oui, comme dans l'immaculée conception, sans partenaire sexuel. Comment cela est il possible? C'est grâce à un phénomène que l'on appelle la parthénogenèse; en l'absence de mal pour se reproduire, le gamète de la femelle se divise tout seul. Certaines espèces de phasmes et de phyllies n'ont recourt pratiquement qu'a cette méthode pour se reproduire, et les mâles sont donc quasiment inexistants car cette méthode ne donne naissance que de petites femelles.
Le phasme a tiare (extratosoma tiaratum) fait parti de ces espèces qui peuvent se reproduire par parthénogenèse. Cela dit, les mâles sont tout de même présents, même en élevage, et certains éleveurs pensent que l'absence de mâles sur plusieurs générations peut amener à la dégénérescence de la souche (ce qui se traduit par des individus de plus en plus chétifs, et beaucoup de pertes lors des premiers stades du développement). Cela serait du aux problèmes de consanguinité et il serait donc préférable d'utiliser la reproduction par fécondation et d'apporter du sang neuf provenant d'autres élevages pour augmenter la diversité génétique et ainsi diminuer les risques. Cela dit, d'autres éleveurs ne rencontreraient pas ces dégénérescence dans leurs élevages et estiment donc que les problèmes rencontrés ne seraient du qu'a des mauvaies conditions d'élevage (conséquences souvent d'une surpopulation)... Dans tout les cas, apporter un peu de diversité n'est jamais préjudiciable à un élevage, si toutes les précautions élémentaires sont prises (compatibilité entre les espèces, individus sains, ect)
Le phasme à tiare est un insecte relativement facile à élever. Il s'habitue très bien à la température ambiante d'une maison; entre 19 et 23 degrés, et avec un taux d'humidité compris entre 60 et 75% ce qui nécessite une vaporisation d'eau quasiment quotidienne sur les phasmes et le feuillage, et particulier pour les jeunes phasmes qui sont très sensibles au manque d'humidité. Il faut utiliser une eau de source, de pluie ou une eau conditionnée ou osmosée d'aquarium car les phasmes peuvent être sensibles au chlore contenu dans l'eau du robinet. Il se nourrissent de nombreuses essences de plantes, en particulier la ronce. Ils acceptent différents types de rosacées (pommier, poirier, rosier, ect). Voici une petite liste non exhaustive de plantes que mes jeunes phasmes apprécient; la ronce, l'alisier blanc, l'aubépine, le rosier, le pyracantha, le framboisier, le pommier. En revanche, ils n'ont pas accepté le robinier faux acacia, ni le lierre.
Pour cet élevage, j'ai confectionné moi même une cage de type "garde manger" avec des tiges de bois et de la moustiquaire. La méthode pour en construire une est disponible sur la page internet indiquée en lien dans la bibliographie. La cage mesure 80 centimètre de hauteur, et la base est un rectangle de 40 par 50 centimètres, et devrait pouvoir accueillir une vingtaine de spécimens adultes. La cage contient 5cm de terre sur le fond pour maintenir le taux d'humidité, est placée un peu en élévation sur un support afin l'isoler du sol pour maintenir la température. Elle possède une porte latérale et un couvercle sur le dessus. Les phasmes y sont placés dès leur naissance, à leur sortie de l'éclosoir.
Vue latérale de mon insectarium
Insectarium vu de dessus
L'éclosoir est constitué d'une boite en plastique du type boite de taboulé, dont le couvercle a été préalablement percé de trous pour assurer l'aération et éviter la prolifération trop rapide des moisissures. Au fond de cette boite, les œufs seront déposés sur quelques épaississeur de feuilles d'essuie-tout humidifiées avec de l'eau de pluie, de source ou de l'eau conditionnée pour aquarium ou osmosée de manière à ce qu'elles restent humides. Il faut surveiller et changer les feuilles d'essuie-tout régulièrement quand les moisissures commencent à se développer. La boite sera placée à une température comprise entre 22 et 25 degrés, dans mon cas sur le couvercle d'un aquarium tropical en fonctionnement. La durée d'incubation est de 4 à 5 mois en moyenne pour des œufs fécondés (les miens ont commencé à éclore à partir du début du 5ème mois seulement), mais peut être de 8 ou 9 mois voir d'avantage si les œufs ne sont pas fécondés, c'est une caractéristique qu'il faut prendre en compte lorsque l'on commande ses œufs sur internet, il faut donc privilégier ceux dont le vendeur ou le donneur assure qu'ils auront été fécondés.
Éclosoir contenant les œufs de phasmes à éclore
Œufs d'Extratosoma tiaratum éclos, séparés de leur opercules
À leur sortie de l’œuf, les larves de phasme sont très agitées, elles n'arrêtent pas de courir dans leur petite boite et sont très agiles, peuvent se faufiler très facilement à travers de petits trous en passant une patte après l'autre. Il faut donc faire très attention à ce stade! Elles sont mimétiques avec une fourmis rouge australienne (son pays d'origine). Cette particularité évolutive, très curieuse, s'explique par une petite histoire; la femelle phasme a tiare vit des les forêts d'eucalyptus, dont elle se nourrit des feuilles. Elle pond jusqu’à deux œufs par jour, quelle projette violemment avec son abdomen. Les œufs se retrouvent sur le sol parfois une centaine de mètres plus bas. Si par hasard, une fourmis de l'espèce Leptomyrmex erythrocephalus tombe dessus, elle les ramène dans sa fourmilière, et les stocke pour en grignoter l'opercule (le couvercle de l’œuf) dont elle raffole. Tout juste sorti de son œuf, le jeune phasme, qui ne mesure alors que quelques centimètres se retrouve donc à gambader au beau milieu d'une colonie de redoutables fourmis rouges! Mais heureusement pour lui Extratosoma tiaratum a su développer aux cours de son évolution un caractère qui lui permet de se dépêtrer en toute facilité de ce milieu hostile; il a tout simplement pris l'apparence d'une fourmis! Ainsi il peut s’échapper de la fourmilière et rejoindre sain et sauf sa plante hôte, ou il se trouve un peu plus en sécurité. A partir de la première mue ce mimétisme disparaît, et le phasme ressemble déjà a un modèle réduit de l'adulte (imago) qui lui mesurera jusqu’à 16 centimètres pour les femelles, 13 à 15 centimètres pour les mâles, et ressemblera à une feuille morte. La croissance s'effectue en 6 stades, et à partir du deuxième stade le début de chaque stade est marqué par une mue. L'insecte consomme en général son exuvie (l'ancienne cuticule, c'est à dire son ancienne couche externe dont il se sépare) assez rapidement.
Femelle stade 2, type "lichen"
Autre femelle, stade 2, type "lichen", dans son environnement
Femelle brune stade 3
Femelle brune stade 3 et juvénile stade 1
Femelle brune stade 2
Même specimen
Juvénile stade 1 avec son abdomen replié, donnant l'aspect mimétique avec une fourmie
Petite remarque; les différences de couleurs observées ne sont pas dues à des différences génétiques entre les individus mais sont issues d'un mimétisme des phasmes avec leur environnement; à partir du second stade, les jeunes vont prendre une couleur qu'ils oonserveront jusqu'à l'âge adulte. Ainsi, en plaçant des branches couvertes de lichen dans l'insectarium, j'ai réussi à obtenir des individus aux couleurs turquoise et grise, d'autres de couleur brune. En y plaçant de nombreux feuillages il est aussi possible d'obtenir des spécimens de couleur verte.
Bibliographie: -http://www.phasmes.com/le_coin_du_debutant.php
-http://www.insectes.org/opie/pdf/2259_pagesdynadocs4daffcf814f10.pdf